André Pieyre de Mandiargues

[…] Sexuelle, sans conteste, est presque toujours la première idée, la suggestion créatrice à partir de laquelle un grand objet en forme de plaisir va s’édifier dans l’espace.. Pourtant le déploiement, l’organisation et l’épanouissement des formes sont là redevables aux sciences mathématiques, comme il nous est démontré par certaines épures où Jean Filhos étudie le développement des fonctions où s’inscrivent les surfaces et les volumes courbes qui feront les structures principales de son ouvrage. L’assemblage de telles structures, lesquelles ont souvent un aspect de coques, achève le volumineux orgasme issu d’une révélation d’éros, et c’est en ce sens-là qu’il convient de parler d’abstraction à propos des sculptures de Filhos, qui ne sont pas plus figuratives que n’est la volupté.
Une comparaison avec la musique moderne, où des séries organisées suivant des règles mathématiques sont mises au service de diverses significations spirituelles, est utile ici, sans être suffisante. Construire une représentation à trois dimensions (au moins) de l’orgasme, n’est-ce pas, à la suite de quelques sculpteurs d’exception (figuratifs en majorité), fondre la science avec le rêve ? […]André Pieyre de Mandiargues

Une pensée, enfin, qui me vient par le chemin de Cordoue (évidemment), est que le monde moderne est en quelque façon obsédé par le contraste de l’instant et de la durée, problème que l’intelligence du sexe élucide avec un peu plus d’acuité que ne font la métaphysique et les mathématiques. Or il me parait manifeste, et je voudrais qu’il soit pour tous évident, que tel contraste est le grand et puissant inspirateur de l’œuvre sculptée de Jean Filhos, que l’on pourrait regarder comme un ensemble de commentaires plastiques à ce sujet. Ainsi considérée, l’œuvre donne avec hauteur sa leçon, qui s’inscrit dans la doctrine de l’amour.

(extraits du catalogue de l’exposition de 1971 à la galerie Villand & Galanis)

Retour aux Textes Page suivante

ACCUEIL BIOGRAPHIE OEUVRES CONTACTS